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«Game of Thrones», la série qui déconstruit l'héroïsme

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Par Peter Reafan, le 12/11/2019

En 2011, nos personnages de séries préférés s'appelaient Walter White, prof de chimie qui devient un baron de la drogue meurtrier; Nucky Thompson, politicien corrompu et gangster à temps partiel, et Don Draper, publicitaire cynique qui trompe sa femme et ment à tout son entourage… Bref, quand Game of Thrones a débarqué à la télé, on était en plein dans le règne de l'anti-héros. Lorsque Ned Stark a été décapité à la fin de la première saison de la série, sa mort fut d'autant plus choquante qu'il était peut-être l'un des rares personnages à la télé à posséder un code moral particulièrement pur. Après lui sont venus Robb Stark, Daenerys, Jon Snow et Arya, figures héroïques qu'on voulait à tout prix voir réussir. Mais le premier est mort de manière particulièrement cruelle, la deuxième a été corrompue par le pouvoir, et les autres obligés de prendre des décisions de plus en plus difficiles et compromettantes pour survivre. À la fin, aucun de ces héros n'a eu la conclusion triomphale à laquelle on aurait pu s'attendre. Alors que toute l'ère de la télé de prestige s'est bâtie avec l'idée que même les personnages les plus corrompus peuvent être touchants, Game of Thrones, elle, s'attache à complexifier des héros traditionnel et s'interroge: l'héroïsme pur existe-il vraiment? Peut-on accéder au pouvoir sans se perdre en chemin? Bons contre méchants À ses débuts, l'univers de fantasy médiévale de Game of Thrones était un véritable ovni parmi les séries d'anti-héros et les drames historiques léchés qui régnaient sur la télé de l'époque. L'anti-héros est imparfait, jureur, antisocial, malhonnête, voire violent. Mais on ne pouvait s'empêcher de l'aimer. Par opposition, Ned Stark, incarné par l'acteur alors le plus connu de Game of Thrones, apparaît tout de suite comme une figure noble et morale, un père affectueux et un homme droit qui agit uniquement par devoir. Dans ses premiers épisodes, GOT apparait comme un récit de héros, où les Stark sont très clairement les gentils et les Lannister leurs antagonistes purement mauvais –ils sont incestueux, menteurs, cruels et méprisants. À l'exception du personnage de Tyrion, un Lannister qui exprime sa sympathie pour les Stark, on a donc à ce moment-là un axe moral assez clair et tranché, chose unique sur le petit écran à cette époque.